Cartographie


Dans la Mappemonde de 1602, Ricci peut donner une représentation relativement correcte à l’Extrême-Orient, et même de l’ensemble du monde, meilleure que les autres cartes européennes ou chinoises de l’époque. Elle est le fruit du dépouillement qu’il a fait des cartes existantes en Europe et en Chine, de son travail de géographe de terrain et de son hypothèse d’identification du Cathay et de la Chine.


S’adressant en premier lieu à des Chinois, il les réalise en mettant leur royaume au centre de la carte, mais il sait parfaitement que ce qu’il leur présente n’est pas conforme à leurs croyances (le Ciel est rond, la Terre est carrée, la Chine est ‘sous le Ciel’), il hésite à les donner en cadeau au préfet de Zhaoqing (肇庆), Wang Pan 王泮 , et à l’empereur Wan Li, qui l’un et l’autre lui en seront très reconnaissants ; deux des grands convertis, Xu Guangqi 徐光啟 (1562-1633) et Li Zhizao 李之藻 (1565-1630), ont confessé que la vue de la Mappemonde de Ricci a suscité en eux de fortes émotions qui ont joué un rôle dans leur processus de conversion.


Cette carte du monde innove en Chine sous divers points de vue : Matteo Ricci introduit le système des longitudes et latitudes, qu’ils n’employaient que pour la voûte céleste ; il présente l’Amérique ; il utilise une division du monde en continent, typiquement européenne. Ricci transcrit la toponymie en caractères chinois, les termes qu’il crée pour les quatre continents sont encore d’usage aujourd’hui, ainsi que beaucoup de toponymes de pays.


Un spécialiste de la cartographie de l’Extrême-Orient, Philippe Pelletier, écrit :

« La cartographie de Matteo Ricci constitue un corpus révolutionnairement novateur à maints égards ; …. elle réalise en 1602 la première planisphère au monde la plus proche des réalisations scientifiques actuelles, d’une acuité et d’une appréhension géographiques époustouflantes pour l’époque, au tout début du XVIIe siècle :

«Preuve de sa pertinence attractive, sa conception est intégrée sans problèmes majeurs par les géographes sinisés eux-mêmes qui la reprennent à leur compte, et ce pour un long moment.

«La cartographie de M. Ricci n’est donc ni jésuite, ni européenne, ni chinoise, elle est un mélange de tout cela et, par là, quelque chose qui se situe même au-delà. Il s’agit d’une réalisation véritablement transnationale, mondiale, la première en ce qui concerne l’Asie orientale, où la stratégie même de colonisation intellectuelle de la Chine par les Jésuites s’efface un temps devant la richesse universelle des connaissances qu’elle apporte.»


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