Fonction politique de l’astronomie


Dans la Chine ancienne, l’astronomie n’était pas une science au sens où on l’entend aujourd’hui, parce qu’elle avait une importante fonction politico-religieuse. Elle servait à l’établissement du calendrier, à la prédiction d’évènements célestes anormaux et à la divination. En d’autres termes, astronomie, numérologie et astrologie étaient imbriquées en une entité indissoluble.


Un calendrier de la fin de l’époque impériale contenait une longue section de dates propices. Elle expliquait le sens de chaque jour et donnait des suggestions sur la manière dont les gens devaient se comporter tout au long de l’année. Comme ce calendrier était autorisé par l’empereur, la destinée et la vie quotidienne des sujets de l’empire étaient par là même symboliquement autorisées et contrôlées par l’empereur par le moyen d’un calendrier dont la précision était une expression du Mandat céleste dont il était investi. Celui qui était capable de publier un calendrier précis prouvait ainsi qu’il était le fils du Ciel. Les écarts entre le calendrier et les phénomènes célestes symbolisaient un avertissement du Ciel à son fils qui avait alors à rectifier ses comportements afin de ramener l’ordre céleste à la normale.


Un calendrier était ainsi étroitement lié à la légitimité d’une dynastie. Chaque dynastie publiait son propre calendrier et lui donnait un nom, même s’il était identique à celui de la dynastie précédente, ce qui fut notamment le cas de la dynastie des Ming. C’est ce rôle politique de l’astronomie qui permet de comprendre que, dès l’année 268, l’état chinois interdit les études astronomiques privées, interdiction dont l’application fut lâche, l’état chinois ayant souvent recruté des astronomes privés pour travailler sur le calendrier. Néanmoins, l’état proclamait son monopole sur la connaissance astronomique pour empêcher les gens de faire état de leur expertise astronomique pour saper la légitimité de la dynastie.


C’est par l’établissement d’un calendrier que les dynasties étrangères qui ont conquis la Chine, les Yuan ou Mongols (1279-1368) et les Qing ou Mandchous (1644-1911), ont proclamé leur Mandat céleste et légitimé leur position de dirigeants sur l’empire chinois en dépit de leurs origines étrangères. Ceux qui étaient réticents à se soumettre au nouvel ordre impérial, comme ce fut le cas des loyalistes Ming, manifestaient leur résistance par le simple refus du calendrier.


D'après Zhu Pingyi