Christofer Clavius (1538-1612)

L’homme

Christopher Clau (ou Schlüssel ?) (latinisé en Clavius) est né en Bavière dans la ville de Bamberg en 1538. Il fut accepté dans la Compagnie de Jésus par Ignace de Loyola lui-même en 1555 et entra très vite à l’Université de Coimbra au Portugal. Il y étudia la philosophie et probablement aussi les mathématiques. En 1563, il commence à enseigner à Rome les mathématiques au Collège Romain et, dès lors et jusqu’à sa mort, sera le mathématicien jésuite le plus influent.

Astronome, il fut notamment l’un des principaux promoteurs de la réforme du calendrier, la réforme grégorienne (1577-1582), ce qui fit des opposants à cette réforme ses adversaires si ce n’est ses ennemis. Il sera aussi le professeur de Galilée.

Mathématicien, son talent ne fut moins d’établir de nouvelles connaissances mathématiques (même si quelques découvertes lui sont reconnues) que d’enseigner dans les salles de cours et par des manuels. Il fut capable de simplifier les mathématiques, de les exposer clairement, de le faire avec un souci d’exactitude et d'utilisation à des applications pratiques.


Ses ouvrages

Clavius écrivit de nombreux ouvrages de mathématiques et d’astronomie.

Le plus célèbre est sans doute sa traduction du grec en latin commentée des Eléments d’Euclide (en 1574 et 1589). Il sera étudié par la plupart des mathématiciens de la Renaissance.


Deux autres œuvres dominent son œuvre et seront traduites en chinois, l’Epitome arithmeticae practicae (1583), Geometrica practica (1604). Il y développe les mesures des figures planes et dans l’espace par des calculs ou à l’aide d’instruments, le dernier chapître étant consacré à la résolution de problèmes.

Une troisième œuvre ne sera pas traduite à Pékin, mais marque l’histoire des symboles mathématiques, Algebra (1608), la première œuvre où apparaissent les signes ‘+’, ‘-‘ et la virgule séparant partie entière et partie décimale.


En astronomie, l’épais On Sphaeram Iohannis de Sacro Bosco commentarius (1570), un nouveau – et dernier - commentaire du Traité des Sphères de John of Holywood, étudié depuis le treizième siècle. Il fut partiellement traduit en chinois, ainsi qu’un autre ouvrage Astrolabis,


La place des mathématiques dans la formation des étudiants

Dans un monde où l’enseignement restait traditionnel, Clavius joua un grand rôle dans la place des mathématiques dans la formation des personnes. En prenant position sur ces questions avec force, il a influencé le «Ratio studiorum» (le programme des études) des collèges (il y en a déjà plus de 150 en 1581) crées pour former les jeunes religieux de la Compagnie de Jésus, mais qui ont été vite ouverts à des jeunes non religieux.

Les universités médiévales enseignaient aux futurs prêtres l’astronomie, Clavius y ajoute les techniques de l’ingénieur (Archimède n’est plus seulement un mathématicien, il est aussi un inventeur prodigieux) et l’algèbre.


Plusieurs préoccupations se rejoignent dans ce choix qu’il fait et qui aura des conséquences considérables sur l’enseignement donné dans les collèges jésuites, et donc sur l’humanisme de la Renaissance. Tout d’abord, les mathématiques sont utiles à d’autres sciences (astronomie, physique, géographie, …) et permettent de résoudre de nombreuses questions pratiques (évaluation des aires, des volumes, …) ; les futurs jésuites doivent les étudier pour être capable de les enseigner dans les collèges (à partir de 1550, des postes d’enseignants de mathématiques à temps plein y sont créés).


Une autre raison se trouve dans la formation à la logique qu’elles permettent et, précise Clavius, meilleure que la scholastique aristotélicienne. Elles possèdent encore la vertu d’être certaines et donc de combattre le scepticisme. Il les apprécie aussi parce que leur étude réunit les gens là où les philosophies les séparent : les écoles philosophiques sont différentes et sont en conflit perpétuel, alors que les mathématiques ne connaissent pas de désaccords et suscitent l’unité.



L’enseignement des mathématiques aux futurs jésuites a encore une autre justification ; avec la cartographie et l’astronomie, elles sont très utiles aux missionnaires pour intéresser les peuples où ils sont envoyés : c’est François Xavier qui le premier en 1552 remarque la curiosité des populations :

«Les Japonais sont si curieux, si rapides à poser des questions et ont une telle soif de savoir que leurs questions sont sans fin. De plus, ils disent à d’autres les réponses que nous leur avons faites. Ils ne connaissaient pas la rotondité de la terre, ni l’orbite du soleil. Ils interrogent sur tous les sujets et, en particulier, sur les comètes, le tonnerre, la pluie, la neige et d’autres matières semblables. Quand nous répondons à leurs questions, ils sont grandement satisfaits et nous regardent comme des hommes instruits. Cela nous était très utile pour qu’ils croient en nos paroles.»


Dans une lettre à Ignace de Loyola, il en tire la conséquence et demande de former des religieux capables d’être de bons artistes, de bons dialecticiens, des savants maîtrisant des matières comme les mouvements célestes, les phases de la lune, les éclipses, les phénomènes météorologiques de la pluie, la neige, le tonnerre, les éclairs, les comètes et les autres phénomènes naturels.

Clavius formera des religieux qui correspondront, de près ou de moins près, à ce portrait, Matteo Ricci, en Chine, et Carlo Spinola, au Japon. Ricci correspondra avec Clavius, qui lui enverra ses principales œuvres pour qu’elles soient traduites en chinois et Ricci le remerciera en y joignant les œuvres traduites en chinois.


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